Peut-on éduquer sans récompenser ? 3/3

peut-on éduquer sans récompenser ?

peut-on éduquer sans récompenser ?

Vous avez lu les deux premiers volets et comme moi, vous avez envie de tester autre chose que les récompenses pour amener vos enfants vers la coopération, la politesse, l’autonomie, la confiance, le sens du service et des efforts… ?

Ou simplement êtes-vous curieux d’en savoir plus ?

Bienvenue dans ce dernier volet consacré aux alternatives aux récompenses. 

 

 

Vous l’aurez compris (en lisant les volets 1 et 2) , je ne suis pas favorable aux récompenses, du moins pas comme méthode éducative. Et par « éduquer » j’entends :

  • apprendre à nos enfants à se comporter convenablement en société,
  • leur transmettre les valeurs qui nous sont chères et,
  • les encourager et leur donner confiance en eux 


Chaque fois que je souhaite encourager ma fille (bientôt 6 ans) à ranger ses jeux, aider à mettre la table, s’habiller le matin pour être à l’heure à l’école, dire merci, attendre que j’aie fini de parler avant de prendre la parole… je me pose les trois questions suivantes :

1 / En quoi son comportement est-il problématique et comment lui dire de façon à ce qu’elle l’entende ?

2 / Quel intérêt peut-elle retirer à changer son comportement ?

3/ Comment lui donner envie de continuer par elle-même (à ranger, dire merci…) ?


J’ai à ce propos une petite anecdote à vous partager…


S’exprimer de façon respectueuse… et efficace !

Un jour ma fille m’a demandé de lui expliquer en quoi consistait mon travail. Je lui ai répondu en substance que j’aidais des parents à trouver un moyen de communiquer avec leurs enfants de façon à éviter les cris, les punitions et les fessées quand les enfants ne veulent pas obéir, etc.

Pour être plus parlante, je lui ai donné un exemple.

Si je te dis : « C’est quoi tout ce bazar dans le salon, y a des jouets partout, range-moi ça tout de suite ! Est-ce que tu as envie de m’aider ? »

Elle m’a répondu : « Non ».

Et si je te dis:  « Quand je vois tes poupées et tes livres par terre et ta doudoune sur le canapé, je suis découragée parce que je vais devoir passer du temps à ranger. Est-ce que tu as envie de m’aider ? »

Elle m’a répondu : « Oui… mais tu me diras merci après ! »

Si vous connaissez, vous aurez sûrement reconnu dans cet exemple, le fameux « Message-je » de Thomas Gordon qui m’a valu cette réponse des plus spontanées !

Si j’ai choisi de parler du « Message-je » dans ce volet sur les alternatives aux récompenses, c’est qu’il me semble être un puissant moteur en matière de responsabilisation et de prise d’initiative. Nul besoin d’évoquer une possible récompense, le simple fait d’informer l’enfant des effets de son comportement sur nous et de lui faire confiance (très important!) peut suffire à le motiver.

Bien sûr rien ne nous empêche d’ajouter une demande ou une proposition (« tu serais d’accord de ranger tes jouets qui sont dans le salon ?« ) mais ça n’est pas toujours nécessaire et le fait de laisser l’initiative à l’enfant donne lieu à des solutions inattendues et souvent très pertinentes. Bon, ça ne marche pas non plus à tous les coups et ça demande un peu d’entrainement…  J’en parle plus en détail dans cet article .

D’un autre côté, la réaction de ma fille souligne à merveille un autre point fondamental : nos enfants ne nous doivent pas la coopération.


La coopération est une dynamique qui s’entretient ! A nous de l’alimenter … »


La récompense est un plus mais elle n’est pas indispensable pour motiver les enfants. D’ailleurs le plaisir que l’on a à coopérer, à rendre service, à tenir compte des besoins des autres n’est-il pas une récompense en soi ? Encore plus s’il l’on a affaire à des personnes qui savent exprimer leur gratitude…


Transmettre sa reconnaissance et son bien-être : une autre clé de la motivation

Vous noterez que ma fille ne m’a pas dit « Oui… si tu m’achètes des Playmobil ! »

Elle m’a simplement demandé un signe de reconnaissance. Un petit « merci » qui ne mange pas de pain. De mon côté, j’ai été touchée d’être ramenée par ce petit bout de femme de 5 ans et demi à quelque chose d’aussi essentiel … et qu’il m’arrive encore trop souvent d’oublier.

Plus motivant encore que le bon vieux « merci », je pourrais également lui dire (une fois les jouets rangés) en quoi son comportement m’est agréable.

–          Ex : je vois que tu as rangé les jouets qui étaient dans le salon et je suis contente parce que je vais pouvoir me reposer au lieu de passer du temps à ranger. 

–          Autre exemple : j’étais soulagée que tu aides ta sœur à s’habiller ce matin parce qu’on a pu arriver à l’heure à l’école, merci !

Ces messages sont un véritable moteur car ils donnent à l’enfant une information claire sur les effets positifs de leurs comportements. Plus nous sommes spécifiques, plus ils savent en quoi nous être agréables (et plus ils le font !). Ce qui est magique aussi c’est que plus nous leur faisons ce genre de retour positif plus ils le font avec nous 😉

Vous remarquerez que ces messages ne contiennent ni évaluation, ni compliment. Je ne fais que décrire des faits, dire mon ressenti et en quoi ce qu’elle a fait a pu m’aider ou m’être agréable. Nous ne sommes pas habitués à nous exprimer de cette façon car nous n’avons tout simplement pas appris à le faire. De ce fait, il nous parait beaucoup plus spontané et naturel de dire « C’est super, t’es géniale, t’es gentille, c’est bien… » que de se poser un instant pour se demander finalement en quoi ce que l’enfant a fait nous est agréable. Pourtant les effets de ce genre de communication sont tout aussi efficaces et bien plus « nourrissants » que ceux des évaluations, des compliments ou des récompenses. Et ce, sans les inconvénients décrits dans mes 2 précédents articles sur le sujet. 

Chaque fois que nous prenons la peine de décrire précisément ce que nous apprécions chez l’Autre et les effets positifs de ses actions sur nous (qu’il s’agisse de nos enfants, conjoints, amis, collègues) c’est comme si nous remplissions nos « réservoirs mutuels de plaisir partagé » ! 

Car il est un phénomène fort agréable qui veut que le plaisir d’exprimer sa gratitude soit égal au plaisir de la recevoir.  

Ce qui nous ramène à ce qu’écrit C. Guegen dans son livre « Pour une enfance heureuse » :

 

Les moments privilégiés entre parents et enfants stimulent les circuits cérébraux du « système motivation-récompense ».

 

Plus que des récompenses matérielles ou des compliments, nos enfants (tout comme nous) ont avant tout besoin de trouver du sens et du plaisir à ce qu’ils font. C’est pourquoi le jeu, le rire, le chant, la danse, l’imaginaire et les câlins sont si efficaces pour amener à la coopération. Chez moi la table n’est jamais aussi vite dressée que lorsque nous jouons « au restaurant » ou à  » la princesse et sa servante » !

Et pour booster la confiance, toujours sans récompense …

 

Décrire plutôt que juger

Dans les situations où l’enfant manque de confiance en lui (dans une matière spécifique à l’école par exemple ou au sport), nous pouvons aussi le valoriser en décrivant précisément ses actions, ses progrès.

Ex: « Je vois que tu as colorié tout ce dessin sans dépasser une seule fois », plutôt que « whouah, que tu colories bien ! »

« Tu as réussi à mettre tous les boutons de ton gilet toute seule ! » plutôt que « tu es une grande fille »

« Je vois comme tu sais maintenant dessiner les bonhommes mettant de plus en plus de détails : le nez, les oreilles, les dents, il a même un bracelet et des boucles d’oreille !! » plutôt que l’incontournable « Oh, il est beau ton bonhomme ! »

Si nous ne voulons pas tomber dans la « toute puissance » de l’adulte qui détermine si ce que l’enfant dit ou fait est « bien » ou « pas bien », nous pouvons aussi inviter nos enfants à s’auto-évaluer en leur reflétant ce qu’ils ressentent face à leurs propres actions :

« tu as l’air fier de toi ! »

« tu es content de ton dessin. Qu’est-ce que tu en penses ? « 

« tu es déçu de ton match, tu aurais aimé marquer plus de buts ? »

Prendre le temps de décrire présente plusieurs avantages :

  • Nous évite de juger (j’en parle plus longuement ici)
  • Permet à l’enfant de prendre conscience de ses compétences et de ses progrès et donc de prendre confiance en lui
  • Nous donne l’occasion de manifester un réel intérêt pour ce que fait l’enfant, ce qui est bien plus valorisant et encourageant pour lui qu’une évaluation vague et souvent trop générale, fut-elle positive (« c’est bien », »c’est beau », « c’est mieux »


Et pour finir… last but not least…


Donner l’exemple !

Ne vous est-il jamais arrivé de vous agacer de voir les chaussures de vos enfants abandonnées en plein milieu de l’entrée (quand leur place est évidemment dans le placard !)  … alors que les vôtres trônent sur le tapis du salon ? Ou encore d’oublier le fameux « mot magique » ? Moi si.

Comme je crois beaucoup à la valeur de l’exemple, à chaque fois que je m’apprête à faire une remarque sur les jouets qui ne sont pas rangés, je m’efforce D’ABORD de vérifier que j’ai moi-même rangé mes affaires. Je scanne rapidement la pièce et là, 8 fois sur 10, je constate que j’ai du pain sur la planche si je veux donner le bon exemple !


Souvenez-vous, nos enfants reproduisent ce que nous faisons, pas ce que nous disons. 


Donner l’exemple est à mon sens la chose à la fois la plus naturelle et la plus ardue en matière d’éducation. C’est en même temps l’un des moyens les plus puissants d’influencer les comportements de nos enfants. Et si ce n’est pas flagrant dans l’immédiat, rassurez-vous, ça paie sur le long terme ! C’est aussi pour le parent un fabuleux moteur de progrès et de remise en question.


Une toute dernière suggestion du Dr Haim Ginott pour :

  • obtenir des résultats durables
  • faire grimper à coup sûr le taux d’ocytocine du parent ET de l’enfant
  • booster l’énergie
  • renforcer les liens
  • multiplier les comportements +++

qui en prime ne coûte rien et nous apporte tellement … 

Si vous voulez rendre vos enfants meilleurs, donnez-leur l’occasion d’entendre tout le bien que vous en dites à autrui »

Dr. Haim Ginott

 


En résumé :

La coopération, la confiance, l’autonomie, la courtoisie, le respect, la reconnaissance, la gentillesse et toutes ces choses que nous apprécions et souhaitons tant voir grandir chez nos enfants sont le résultat d’un cercle vertueux que nous avons le pouvoir d’initier et d’entretenir chaque jour. En mettant davantage de conscience dans nos paroles et dans nos actes mais aussi par de petites attentions quotidiennes. Je vais pour ma part aller dire à ma fille combien j’ai apprécié de la voir jouer joyeusement et tranquillement (c’est-à-dire sans m’interrompre ou presque!) avec son amie Manon pendant tout le temps où je rédigeais cet article 😉



Pour aller plus loin… 

 

votre-guide-faber-et-mazlishParents épanouis, enfants épanouis – Votre guide pour une famille plus heureuse de A. Faber et E. Mazlish

Pour poursuivre votre réflexion et trouver d’autres conseils à appliquer au quotidien, toujours dans l’idée d’éduquer sans punition ni récompense, vous trouverez en principe, votre bonheur dans ce « guide » qui se lit comme un roman ! Un parfait complément du livre « Parler pour que les enfants écoutent, écouter pour que les enfants parlent » (à lire avant celui-ci si vous cherchez des outils plus concrets et directement applicables avec vos enfants)

20,00 €  Commander ce livre sur Amazon.fr

 

 

 

 

2 commentaires


  • Cécilia

    Merci Delphine pour cette merveilleuse « trilogie » ! Très très instructive, très claire et bien argumentée ! J’ai partagé avec de nombreuses mamans.

    mars 03, 2015
    • Merci Cécilia pour ce retour enthousiaste !

      Ravie que cette trilogie vous ait inspirée et merci de l’avoir fait connaître autour de vous 😉

      A bientôt pour de nouveaux articles

      Delphine

      mars 05, 2015

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